Nous sommes de plus en plus nombreux à rechercher un meilleur équilibre de vie, à nous soucier de notre santé et de celle de nos enfants, à souhaiter mieux "gérer" les éventuelles pressions quotidiennes. Le retour à la simplicité, un rapprochement à la Nature, une alimentation plus saine (limitation de produits ou substances agressives pour notre organisme), sont des quêtes légitimes que partage un grand nombre d'individus.
Ceci explique aussi l'intérêt grandissant pour les pratiques dites "non-conventionnelles". Près de la moitié des français y ont recours au moins une fois dans leur vie.

Il y a les fidèles à ce type de soins, ceux qui les découvrent après avoir été confrontés à des problèmes de santé, les curieux qui souhaitent expérimenter certaines pratiques, etc. Il y a aussi les sceptiques et détracteurs qui leur refusent toute légitimité et ne donnent crédit qu'à la médecine conventionnelle occidentale.
Ce domaine suscite donc de nombreux débats !!
Reste une triste réalité que l'on ne peut nier : nombreuses dérives existent et ce secteur n'est pas suffisamment encadré et contrôlé en France !
Cet engouement pour les "médecines" douces a vu naitre un grand nombre de praticiens, souhaitant en tirer profit, aux compétences douteuses et dénominations "professionnelles" très "inventives", abusant de la confiance des nombreuses personnes et mettant en jeu leur santé.
Résultat :
Certains praticiens ouvrent un cabinet sans être suffisamment ou correctement formés à leurs pratiques.
Un grand nombre de formations en tout genre voient le jour, souvent inappropriées et de durée insuffisante (seulement quelques heures !).
Le terme "diplôme" associé à l'exercice de ces pratiques est très fréquemment employé à tort, trompant la clientèle (ou les stagiaires dans le cadre de leur formation).
La réputation des pratiques de soins complémentaires est parfois mise à mal et ce manque d'encadrement nuit aux praticiens compétents qui exercent avec sérieux (et il en existe beaucoup, fort heureusement !). Plus grave, cela peut nuire aussi à la santé des personnes suivies.
C'est ce point précis qui motive l'écriture de cet article : il me semble nécessaire d'apporter des précisions sur la règlementation française en vigueur et de mettre en garde sur de possibles dérives, qui ne devraient nullement remettre en cause les bénéfices de certaines pratiques.
Comment faire le tri dans l'ensemble des praticiens disponibles en France et faire le bon choix ?
Comment éviter les abus de confiance et recevoir les bons conseils, adaptés à soi ?
Faisons donc un point général pour vous permettre une vision plus éclairée...
LES PRATIQUES DE SOINS NON CONVENTIONNELLES
Les pratiques de soins non conventionnelles (PSNC) sont très diverses : ostéopathie, chiropraxie, méditation, hypnose, mésothérapie, auriculothérapie, biologie totale, lypolyse, acupuncture, moxibustion, homéopathie, biorésonance, phytothérapie, thérapie nutritionnelle, réflexologie, naturopathie, aromathérapie, hypnothérapie, sophrologie, thermalisme psychiatrique, jeûne, massages, qi gong, tai-chi etc.
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) recense plus de 400 disciplines !
Ces pratiques se développent parallèlement à la médecine « conventionnelle », en France et partout dans le monde. Elles sont en progression dans le champ du bien-être, de la nutrition et de l’apparence esthétique.
Elles sont librement nommées : médecines douces, thérapies alternatives ou complémentaires, médecines holistiques, etc. Plus récemment le terme de thérapies "intégratives" est également apparu.
Le ministère de la Santé évoque le terme de « pratiques de soins non conventionnelles ».
L’Ordre des médecins parle pour sa part de "médecines alternatives et complémentaires", (également connues sous le sigle de MAC). Il décline les MAC en quatre catégories : les thérapies manuelles (chiropraxie, kinothérapie, réflexologie, etc...), les thérapies corps-esprit (sophrologie, hypnose, PNL, etc...), les thérapies biologiques (aromathérapie, phytothérapie, gemmothérapie, etc...), les systèmes complets (homéopathie, acupuncture, naturopathie, etc...).
Depuis 2011, la HAS emploie le terme "interventions non médicamenteuses" (INM) pour toutes interventions non invasives et non pharmacologiques sur la santé humaine qui vise à prévenir, soigner ou guérir un problème de santé. Les INM s'appuient sur des preuves scientifiques. Ce qui n'est pas toujours le cas pour toutes les pratiques dites 'médecines douces".

FORMATIONS DES THÉRAPEUTES OU PRATICIENS
Formation en médecine « conventionnelle »
La médecine « conventionnelle » est enseignée dans les facultés de médecine. Les études de médecine conduisent à l’obtention de diplômes de niveau national. Pour obtenir le diplôme et le titre de médecin, les seules matières enseignées sont les pratiques « conventionnelles ». Les autres professions de santé (chirurgiens-dentistes, sages-femmes, infirmiers, etc.) bénéficient également d’un enseignement conduisant à l’obtention de diplômes de niveau national s’appuie sur des traitements qui ont toujours obtenu une validation scientifique, soit par des essais cliniques, soit parce qu’ils bénéficient d’un consensus professionnel fort.

L’exercice de la médecine est réservé aux seuls médecins. Ceux-ci doivent être inscrits au tableau du Conseil de l’ordre des médecins.
Le public peut vérifier cette inscription sur le site du Conseil national de l’ordre des médecins (CNOM). Les chirurgiens-dentistes et les sages-femmes exercent une profession médicale à compétence limitée. Ils sont inscrits auprès de leurs Ordres respectifs. (article L.4111-1 et L.4112-1 du code de la santé publique)
Formation en pratiques de soins non conventionnelles

L’enseignement de "pratiques de soins non conventionnelles" ne donne pas lieu à des diplômes nationaux en France, à l’exception de l’acupuncture ("capacité" au sein des facultés de médecine).
Certaines formations font l’objet de diplômes d’université (DU) ou de diplômes interuniversitaires (DIU) placés sous la seule responsabilité d’une ou de plusieurs universités (ce sont des diplômes complémentaires qui, à eux seuls, ne donnent pas le droit à l’exercice d’une profession de santé).
Parallèlement à ces DU, d'autres formations font l'objet de certifications officielles (Titre RNCP) délivrées par les organismes de formation ou écoles pour attester des compétences acquises par l'élève ou le stagiaire. Elles sont soumises à des règles précises concernant leur contenu, le nombre d'heures à réaliser et la validation des connaissances de l'élève.
Quid des autres formations ?
Outre les cas évoqués précédemment, nombreuses autres formations sont proposées par des centres de formation privés, ces dernières ne pouvant légalement délivrer que des attestations de suivi de formation aux apprenants. Ces formations n'ont aucune reconnaissance officielle (l'enseignement dispensé peut donc y être très insuffisant pour justifier d'une pratique professionnelle autonome ultérieure).
Or, certains centres restent volontairement vagues sur la nature de l’attestation délivrée et recourent abusivement à des formulations du type : formations « diplômantes » (permettant d'obtenir un diplôme d’État) ou « certifiantes » (débouchant sur un certificat de qualification reconnu par les branches professionnelles) .
Le problème est qu'il n'y a pas "sur le terrain" de réelle différence de reconnaissance d'une compétence acquise, quelle que soit la formation suivie : en effet, toute personne ayant suivi une formation quelle qu'elle soit (avec ou sans certification reconnue), est en droit d'exercer et de proposer des prestations de services.
C'est pourquoi le sérieux de l'organisme et du contenu des cours est essentiel (l'agrément par l'Etat est indispensable).
Le professionnalisme, l'honnêteté et les compétences de la personne ayant suivi ces formations l'est tout autant. Hélas, ce n'est pas toujours le cas malgré quelques règles établies. Voyons ces règles plus en détail...
LA RÉGLEMENTATION EN VIGUEUR
Nous venons de le voir, aucun encadrement n'est à ce jour mis en place pour contrôler les compétences d'un praticien en soins complémentaires ! Une simple formation, même sommaire, autorise à exercer auprès de particuliers et à ouvrir un cabinet.
En respect des articles L4161-1 à L4161-6 du Code de la santé publique, il est interdit à tout praticien de se prétendre "professionnel de santé". Aucune "prescription" ne peut être délivrée ou "diagnostic" donné. L'utilisation des termes "patient" ou "consultation" est également strictement interdite.
La vigilance et la prudence sont donc de mise concernant votre interlocuteur. La confusion sur le statut professionnel et des allégations de santé est fréquente. Les abus de confiance sont nombreux (tant au niveau des formations que des praticiens).
La Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF) met en place des contrôles mais ce n'est hélas pas toujours suffisant pour stopper les dérives.
Les contrôles
La DGCCRF a lancé une nouvelle série de contrôles dans le secteur des pratiques alternatives entre octobre 2020 et septembre 2021, suite à une enquête initiale menée en 2018.
Cette fois, l'enquête a été étendue à près d'une cinquantaine de disciplines différentes, allant des pratiques populaires telles que la naturopathie et la réflexologie, à des méthodes plus rares comme le Reiki ou les thérapies prétendant influer sur les ondes et les flux d'énergie, telles que les "access bars", la thérapie quantique, la biorésonance, la géobiologie et le magnétisme.
Les contrôles ont ciblé à la fois les praticiens et les centres de formation pour vérifier la transparence de l'information fournie aux consommateurs et la légalité des pratiques commerciales.
Les résultats de l'enquête de la DGCCRF ont révélé un taux d'anomalie de 66 % (à peine inférieur à celui constaté lors de l'enquête précédente en 2018), portant sur un éventail plus restreint de pratiques non conventionnelles.
Bien qu’il ressorte de l’enquête que ces professionnels sont parfaitement conscients de ne pas appartenir au milieu médical, certains d’entre eux usent abondamment dans leur communication de termes et expressions en rapport avec la santé et les maladies alors même que leur utilisation est encadrée par le code de la consommation (sont réputées trompeuses, au sens des articles L. 121-2 et L. 121-3, les pratiques commerciales qui affirment faussement qu'un produit ou une prestation de services est de nature à guérir des maladies, des dysfonctionnements ou des malformations).
Les centres de formation n'intègrent pas toujours dans leur programme d'apprentissage la connaissance des obligations légales découlant des lois, telles que le droit de la consommation ou le code de la santé publique.
Une formation pratique doit inclure une compréhension du cadre réglementaire pertinent et sensibiliser les stagiaires aux risques liés à l'exercice illégal de professions de santé ou à l'usurpation de titres.
Les contrôles effectués par la DGCCRF ont mis en lumière le fait que certains formateurs font usage d'allégations thérapeutiques, ce qui est strictement interdit. De plus, ces formateurs fournissent à leurs élèves des modèles de publicité comportant de telles allégations et les encouragent à les utiliser.
Dans la plupart des cas, les infractions les moins graves, souvent dues à une méconnaissance des réglementations plutôt qu'à une intention de tromper le consommateur, ont entraîné des avertissements, surtout compte tenu de l'impact de la crise sanitaire sur l'activité.
Pour les infractions les plus sérieuses, des mesures correctives telles que des injonctions de mise en conformité, voire des sanctions répressives sous forme de procès-verbaux, ont été appliquées.
Les recours en cas de non-respect de la règlementation
Si vous pensez avoir été victime d’une exigence financière exorbitante, d’une déstabilisation mentale, ou si un discours dénigrant la médecine conventionnelle vous a été tenu, il est possible que vous ayez été victime d’une dérive sectaire. Vous pouvez le signaler à la mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (MIVILUDES).
Si vous pensez avoir été victime d’une escroquerie, vous pouvez contacter la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) ou la Direction départementale de la protection des populations (DDPP) de votre département.
Si vous pensez qu’une publicité pour une méthode non conventionnelle ne traduit pas la réalité, qu’elle est mensongère, qu’elle peut conduire des personnes confiantes à l’utiliser alors qu’elle est dangereuse, vous pouvez adresser cette publicité accompagnée de vos remarques à la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), à l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) (article L.5122-15 du CSP), ou à la direction départementale de la protection de la population (DDPP).
Les dérives : comment les éviter et les reconnaitre ?
Avant de recourir à une pratique de soins, il est conseillé d'interroger votre interlocuteur et de se poser les bonnes questions afin de recueillir les informations vous permettant de prendre une décision éclairée.

Les questions principales à se poser ou à poser au praticien avant de démarrer une pratique ou un soin
Quelles sont les qualifications du professionnel que je vais consulter ? Quelles formations a-t-il suivi, peut-il m'en présenter la preuve ?
S'il se qualifie médecin, est-il inscrit au tableau de l’ordre des médecins ? Avec quelle spécialisation ?
Ce professionnel va-t-il demander un avis à un autre professionnel plus spécialisé ou à une équipe hospitalière s' il se trouve face à un cas complexe ou grave ?
Ai-je recours à ce traitement en raison d’un échec d’une médecine conventionnelle ? Me demande-t-on d’arrêter mon traitement conventionnel ?
Où puis-je me renseigner sur la pratique qui m’est proposée ?
Le traitement et suivi est-il adapté à mon problème de santé ? Existe-il des preuves de son efficacité ? Les produits utilisés sont-ils autorisés pour traiter le problème de santé ?
Quels sont tous les risques et contre-indications liés à ce traitement ? Des effets secondaires sont-ils prévisibles ? Ai-je interrogé d’autres personnes ayant subi le même traitement, sur d’éventuels accidents ?
Le traitement qu’on me propose ne risque-t-il pas de retarder l’instauration d’un traitement conventionnel ?
Combien de temps ce traitement va-t-il durer ? Un suivi est-il prévu ?
Comment et quand pourrai-je juger du résultat ? Combien de temps vont durer les effets du traitement ?
Des précautions particulières sont-elles nécessaires avant ou après le traitement qui m’est proposé ? Le traitement est-il douloureux, si oui des antalgiques sont-ils prévus ?
Si des injections ou l'usage de matériel spécifique sont prévus, les conditions d'hygiène sont-elles respectées ?
Quel sera le coût du traitement ? Est-il pas remboursé par la Sécurité Sociale ? Un devis peut-il être fourni ?
Si je change d’avis et décide de ne pas suivre l’intégralité du traitement, devrai-je payer l’intégralité du soin ?
Quels moyens ai-je à ma disposition si je suis mécontent(e) du résultat ? S’il y a un effet secondaire non prévu, à qui le déclarer ?
Le professionnel a-t-il souscrit une assurance professionnelle ? Peut-il m'en fournir la preuve ?
Cela peut paraitre excessif, mais il en va de votre santé.
Le secteur des pratiques de soins complémentaires attire nombreux "pseudos" thérapeutes, il faut s'adapter à cette réalité !
COMPLEMENTARITE DES APPROCHES
Nombreuses solutions existent pour retrouver un équilibre physique et mental et se sentir mieux, personne ne peut se prétendre détenteur de la solution idéale et unique.
C'est pourquoi la modération des discours devrait être de mise : la médecine conventionnelle reste indispensable et prioritaire pour nombreuses pathologies, elle ne doit par pour autant nier les bénéfices que peuvent apporter les médecines traditionnelles et dites "naturelles" en complément.
La collaboration entre médecins et praticiens peut apporter de nombreux avantages pour le bien-être des personnes.
Complémentarité des approches: La médecine conventionnelle se concentre souvent sur le traitement des symptômes à l'aide de médicaments ou de procédures médicales, tandis que les médecines traditionnelles adoptent souvent une approche holistique en tenant compte du bien-être physique, mental et émotionnel. En combinant ces approches, les patients peuvent bénéficier d'un traitement plus complet et personnalisé.
Prise en charge intégrative: Une collaboration entre les deux types de médecine permet une prise en charge intégrative où les médecins peuvent recommander des approches complémentaires en fonction des besoins spécifiques du patient.
Respect des choix du patient: Certains patients préfèrent les approches naturelles ou traditionnelles pour leur traitement en raison de préférences personnelles, de croyances culturelles ou de préoccupations concernant les effets secondaires des médicaments. Il est important de respecter ces choix et de travailler avec le patient pour trouver des solutions qui répondent à ses besoins tout en assurant sa sécurité et son bien-être.
Approche préventive: Les médecines traditionnelles mettent souvent l'accent sur la prévention et le maintien de la santé à long terme. En intégrant ces approches dans les soins de santé conventionnels, il est possible de promouvoir la santé et de prévenir les maladies avant qu'elles ne se développent.
Cela nécessite une ouverture d'esprit, une communication transparente entre les professionnels de la santé et une approche centrée sur le patient pour garantir des résultats optimaux.
Chaque personne est unique, et ce qui est efficace et bénéfique pour vous ne le sera peut-être pas pour quelqu'un d'autre et vice-versa.
Se sentir mieux ou bien, dépend aussi en grande partie de soi . Un bon professionnel ne fera que vous accompagner sur ce chemin, vous apportera quelques clés et techniques pour lesquelles il a été formé, mais ce, sans injonction ni manipulation. Une relation praticien/client (rappelons que le terme patient est réservé aux médecins) équilibrée et sereine est essentielle. D'où l'importance d'un respect et d'une confiance réciproque.

Avertissement : L'utilisation des pratiques de soins complémentaires ne dispense pas de consulter prioritairement votre médecin pour tout problème de santé. Il est seul habilité à établir un diagnostic sur votre état de santé, il dispose de votre dossier médical, et adapte un traitement en conséquence. En cas de maladies sévères, un traitement allopathique reste inévitable. Discutez avec votre médecin de votre souhait de complémenter votre traitement par des pratiques naturelles afin de limiter, si cela est possible, la prise de médicaments chimiques. Ils sont de plus en plus nombreux aujourd'hui à en reconnaitre l'utilité.
Cet article a été préparé avec l'aide des sources suivantes :
www.economie.gouv.fr/dgccrf/ - www.inserm.frwww.conseil-national.medecin.fr - www.france-assos-sante.org/
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