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Photo du rédacteurVéronique Rohan

Règlementation sur la commercialisation des plantes médicinales et produits à base de plantes



La réglementation (normes françaises ou européennes) concernant la commercialisation des plantes médicinales et des produits à base de plantes est complexe : la plante est segmentée en divers statuts en fonction de ses usages : thérapeutique, alimentaire, aromatique ou encore cosmétique, ... eux-mêmes segmentés en catégories. Ses différents degrés de transformation sont également pris en compte. Quelques explications s'imposent pour y voir plus clair :



La liste des plantes médicinales de la pharmacopée française



La pharmacopée française est un répertoire officiel de plantes considérées comme possédant des propriétés médicinales (art. L. 4211-1 du Code de la Santé Publique).

Depuis le 1er août 2013, cette liste est scindée en une liste A et une liste B.


La vente de ces plantes médicinales en l’état est réservée aux pharmaciens, sauf pour celles libérées du monopole pharmaceutique. Etant évolutive, de nouvelles plantes sont ajoutées régulièrement à cette liste (c’est notamment le cas, ces dernières années, de plantes médicinales des département français d’outre-mer et de plantes médicinales chinoises.)


La liste A


Elle correspond aux plantes médicinales utilisées traditionnellement.

Au 1er janvier 2020, elle comprend 454 plantes :


- 416 plantes, sont dites "drogues végétales" et restent sous le monopole pharmaceutique. - 148 plantes, d’usage thérapeutique non exclusif, sont sous le statut de denrée alimentaire et libérées du monopole pharmaceutique (peuvent être vendues en dehors du circuit officinal) si elles sont vendues en l’état (Décret n° 2008-841 du 22 août 2008) . Elles présentent des usages alimentaires ou condimentaires.


(Mise à jour Avril 2021 : liste A publiée par ANSM au 01/01/2021)



La liste B



Elle correspond aux plantes médicinales utilisées traditionnellement en l’état, ou sous forme de préparation, dont les effets indésirables potentiels sont supérieurs au bénéfice thérapeutique attendu, par exemple en raison de leur toxicité. Cette liste comprend un nombre indéterminé de plantes, car l’ensemble des espèces de certains genres botaniques, figurent sur cette liste, sans que ces espèces soient individuellement citées.

Ces plantes ne peuvent être vendues en l'état, y compris par des pharmaciens.




Les différents statuts d'une plante


Le statut de médicament


Le médicament fait l'objet de procédures strictes d'autorisation et de contrôle.

Depuis 2004, une procédure simplifiée d'autorisation de mise sur le marché (AMM) concerne les médicaments traditionnels à base de plantes .


Les médicaments traditionnels à base de plantes sont classés en différentes catégories :

Les spécialités pharmaceutiques

Une spécialité pharmaceutique est un médicament préparé à l'avance, présenté sous un conditionnement particulier et caractérisé par une dénomination spéciale.

Il existe 3 procédures d'accès au marché :

- demande d'autorisation de mise sur le marché (AMM) sur la base d'un dossier complet : la sécurité et l'efficacité du médicament sont démontrées sur la base d'essais non cliniques et cliniques comme pour tout autre médicament ; - demande d'autorisation de mise sur le marché sur la base de l'usage médical bien établi : le demandeur démontre, par référence à une documentation bibliographique appropriée, que la ou les substances actives présentent une efficacité reconnue (sur la base de l'usage, démontré depuis au moins 10 ans en France ou dans l'Union européenne) ainsi qu'un niveau acceptable de sécurité ; - demande d'enregistrement des médicaments traditionnels à base de plantes : la procédure d'autorisation est simplifiée ; l'ANSM délivre un enregistrement, sur la base non pas d'essais cliniques mais d'éléments bibliographiques et de rapports d'experts établissant que le médicament a fait l'objet d'un usage médical depuis au moins 30 ans au moment de la demande, dont au moins 15 ans dans l'Union européenne ou l'Espace économique européen, une étude bibliographique des données de sécurité accompagnée d'un rapport d'expert, et le cas échéant les données nécessaires à l'évaluation de la sécurité du médicament. La sécurité est documentée sur la base d'un rapport d'expert et de données de sécurité. Le cas échéant des essais supplémentaires peuvent être demandés.


Les préparations magistrales et officinales

Ces préparations sont réalisées et délivrées sous la responsabilité d'un pharmacien dans le respect des bonnes pratiques de préparation.

- Une préparation magistrale est préparée par le pharmacien (en pharmacie d'officine ou hospitalière) sur prescription médicale et destinée à un patient déterminé en l'absence de spécialité pharmaceutique adaptée ou disponible. - Une préparation officinale est un médicament inscrit à la pharmacopée ou au formulaire national, préparé en pharmacie d'officine et destiné à être dispensé directement aux patients de cette pharmacie. Les mélanges pour tisanes s'inscrivent dans ce cadre : ils peuvent être réalisés par les pharmaciens d'officine selon les conditions décrites dans une monographie du formulaire national.

Les drogues végétales


Il s'agit des plantes médicinales, en vrac, ou encore des huiles essentielles, pour un emploi à visée thérapeutique.

Le contrôle de la conformité des produits relève de l'ANSM, qui peut prendre des mesures de police sanitaire (retrait de produits ou de lots).

La surveillance relève du dispositif de pharmacovigilance qui impose le signalement par les professionnels de santé ou les laboratoires de tout effet indésirable suspecté d'être dû à un médicament ; les patients peuvent également procéder à une telle déclaration.



Le statut de denrée alimentaire


Au niveau national, la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) et l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) sont compétents.



Les plantes en vrac ou en mélange (boissons, tisanes)


148 plantes médicinales de la pharmacopée ont été sorties du monopole pharmaceutique en raison de leur usage alimentaire ou condimentaire et peuvent ainsi être vendues avec le statut alimentaire, sans revendication possible, toutefois, d'une indication thérapeutique.


Voici la liste de ces 148 plantes (format pdf téléchargeable - droits réservés) :



Les compléments alimentaires à base de plantes



Le décret n° 2006-352 du 20 mars 2006, qui a transposé la directive 2002/46/CE du Parlement européen, en donne la définition suivante : il s'agit des « denrées alimentaires dont le but est de compléter le régime alimentaire normal et qui constituent une source concentrée de nutriments ou d'autres substances ayant un effet nutritionnel ou physiologique seuls ou combinés, commercialisés sous forme de doses » ( gélules, pastilles, comprimés, sachets de poudre, ampoules, flacons munis d'un compte-gouttes ou toute autre forme de préparation destinée à être prise en unités mesurées de faible quantité).


Quelle frontière avec le statut de "médicaments" ?


- Les compléments alimentaires à base de plantes peuvent avoir un effet physiologique (maintenir l'état d'équilibre naturel de l'organisme) et font l'objet d'une "allégation de santé" (par exemple : "contribue à renforcer les défenses naturelles de l'organisme" ou "facilite un meilleur transit"). L’étiquetage des compléments alimentaires ne peut revendiquer des indications thérapeutiques. Toutefois des "allégations de santé" peuvent être mentionnées dans le respect de la réglementation appliquée aux compléments alimentaires.

- Les médicaments traditionnels à base de plantes ont un effet pharmacologique (rétablir l'équilibre naturel de l'organisme en corrigeant un état pathologique), et font l'objet d'une d'une "allégation ou indication thérapeutique". Ils se distinguent par la mise à disposition systématique d'une notice, rédigée selon un schéma standard commun à tous les médicaments. La notice comporte notamment les mises en garde, les effets indésirables éventuels et les précautions d’usage.


Définition d'une "allégation de santé"


La communication sur les caractéristiques nutritionnelles des aliments et leurs bénéfices pour la santé s'inscrit dans un cadre réglementaire très strict défini au niveau européen.


Une "allégation de santé" est « toute allégation qui affirme, suggère ou implique l'existence d'une relation entre, d'une part, une catégorie de denrées alimentaires, une denrée alimentaire ou l'un de ses composants et, d'autre part, la santé ».


Contrôles


La mise sur le marché des compléments alimentaires à base de plantes relève d'une procédure strictement encadrée afin de garantir la sécurité des consommateurs :


- les produits doivent faire l'objet d'une déclaration auprès de la DGCCRF qui assure un contrôle de conformité. La DGCCRF contrôle la présentation et la composition des produits, leur sécurité en matière d'hygiène et la conformité des "allégations santé"

- ils font ensuite l'objet d'une surveillance dans le cadre du dispositif de nutrivigilance suivi par l'ANSES, permettant de faire remonter les effets secondaires recensés par les professionnels de santé, les patients ou les laboratoires.



Le statut de produit cosmétique et les autres catégories



Les produits cosmétiques


Ils contiennent le plus souvent des extraits de plantes ou des huiles essentielles et sont régis au niveau européen par le règlement n° 1223/2009 CE qui encadre leurs modalités de mise sur le marché. Celle-ci se fait sous la responsabilité du fabricant, sans autorisation préalable, sous réserve de ne pas nuire à la santé humaine dans les conditions normales ou raisonnablement prévisibles d'emploi, en faisant mention de leur composition pour l'information des consommateurs.


Un dossier doit être constitué par les opérateurs comprenant une évaluation de la sécurité pour la santé humaine du produit fini . Ce dossier est mis à la disposition des autorités compétentes à savoir l'ANSM et la DGCCRF qui assurent la surveillance des produits dans le cadre du système de cosmétovigilance et peuvent prendre des mesures de police sanitaire.



Les autres statuts


- Les dispositifs médicaux, qui sont des produits de santé, incorporent parfois des substances végétales, mais ne sont pas des médicaments. La principale différence entre un dispositif médical et un médicament réside dans son mode d’action : l’action principale du dispositif médical est obtenue par des moyens physiques (par exemple, une action mécanique, une barrière physique, le remplacement ou le soutien d’un organe ou d’une fonction de l’organisme, etc.) et la présence d’une substance végétale dans sa composition ne doit pas entrainer d’effet pharmacologique ou immunologiques, ni de modification du métabolisme.


- Les Arômes alimentaires (dont huiles essentielles)


- Les Parfums d'ambiance (dont huiles essentielles) : le règlement REACH entré en vigueur en 2007 s'applique sur ce statut



Qu'en est-il du monopole pharmaceutique ? (Explications)



Le monopole des pharmaciens sur la vente et la dispensation au public des médicaments est inscrit à l'article L. 4211-1 du code de la santé publique.


Ce monopole s'applique à l'ensemble des médicaments à base de plantes. Il s'étend, « sous réserve de dérogations fixées par décret », à la vente des plantes médicinales inscrites à la pharmacopée.


Le monopole pharmaceutique concerne par ailleurs la vente d'huiles essentielles présentant une certaine dangerosité, dont la liste est fixée par décret (Décret n° 2007-1198 du 3 août 2007 : voir Pdf ci-après) : elles sont actuellement au nombre de 15. Ces huiles essentielles sont identifiées comme ayant un rapport bénéfice/risque négatif; il est préférable de ne pas les délivrer. Elles ne sont disponibles que dans le circuit pharmaceutique en raison de leurs propriétés neurotoxique (absinthe, thuya, sauge officinale), irritante (sabine, moutarde), phototoxique (rue) ou cancérigène (sassafras)




Pourquoi ce monopole ?



- Il garantit un haut niveau de traçabilité et de sécurité des produits : application de contrôles stricts sur l'ensemble de la chaîne (approvisionnement, préparation, délivrance), en particulier pour prévenir les falsifications, contrefaçons et risques de contamination;

- Il prévient le risque d'une banalisation du médicament : les médicaments sont délivrés par des professionnels disposant d'un haut niveau de formation médicale;

- Il protège les personnes les plus vulnérables contre des risques de dérive thérapeutique ou de charlatanisme : certains produits ou des plantes parfois interdites à la vente en dehors des pharmacies, toxiques ou dangereuses, sont proposés et parés à tort de vertus « miracles » non confirmées par la littérature scientifique, comme censés guérir le cancer, le VIH ou encore la sclérose en plaques !


Conclusion : La vigilance sanitaire reste indispensable



Nous avons souvent tendance à associer le produit naturel à un produit sain, sans danger, il faut rappeler que les premiers poisons sont dans la nature ; Mais, comme précisait Paracelse : "c'est la dose qui fait le poison".


Les risques d'interaction entre plantes et médicaments (iatrogénie) sont à prendre en compte (par exemple, le millepertuis, plante indiquée comme antidépresseur léger, peut bloquer l'action d'autres traitements)


Des interactions entre phytothérapie et certaines chimiothérapies ont été relevées, alors même que de nombreux patients atteints de cancer ont recours aux plantes - parfois sans le dire à leur médecin - pour aider à supporter les effets secondaires de leurs traitements.


Les huiles essentielles peuvent présenter des risques plus importants, certaines - relevant en l'occurrence du monopole pharmaceutique - ayant des propriétés neurotoxique (thuya, sauge officinale), phototoxique (rue) ou irritante (sabine, moutarde). L'essor de leur consommation s'est accompagné d'une augmentation des remontées aux centres antipoison.


Il est relévé par certains laboratoires - informations à recevoir avec prudence sans sources confirmées en 2021 - que "98 % des cas sont non graves et s'élèvent à deux cas par million d'unités vendues, à comparer aux 27 signalements par million d'unités vendues des autres médicaments").

A noter également que les risques d'interaction médicamenteuse ne sont pas le seul fait des plantes : des aliments peuvent aussi être en cause ; par exemple, le jus de pamplemousse ralentit la métabolisation de nombreux médicaments.



Ces constats mettent en évidence le besoin d'encadrer l'usage des plantes par un conseil avisé et une information complète afin de garantir la sécurité des consommateurs.


Il est important d'approfondir la recherche sur les interactions, positives comme négatives, entre allopathie et phytothérapie, ainsi que sur les conditions d'emploi des plantes et leurs éventuelles contre-indications.






Sources externes officielles :

- https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/article_jo/JORFARTI000002080802?r=BaS3WFqLrf




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